Dans l’Odyssée, Homère écrivait « notre vie est un voyage dans l’hiver et dans la nuit, nous cherchons notre passage dans le ciel où rien ne luit. »
C’est vrai… Où avons-nous entendu ce terme « initiatique » déjà ? que veut-il dire… surtout dans notre civilisation occidentale où l’information est reine. Il y a belle lurette que nous nous connaissons, notre vie est balisée, elle est concrète, nous savons où nous allons : nous nous instruisons, nous entrons dans la vie active, nous nous marions, nous avons des enfants que nous éduquons, nous profitons de la technique qui a réduit les distances pour parcourir le monde, nous vieillissons entourés de nos enfants et petits-enfants… Veni, vidi, vici a proclamé César.
Alors, initiation ? Peut-être oui… nous nous initions pour comprendre la problématique de nouvelles technologies : avant j’étais dans l’ignorance et maintenant je sais … qu’il me manquait une connaissance : la bureautique m’est connue maintenant, par exemple. On peut dire que l’initiation est une porte entre un état et un autre, différent.
Chez la femme, l’initiation est un passage entre l’état d’enfant à celui de jeune femme. Etat caractérisé par l’apparition des menstrues. Elle prend conscience qu’elle va donner la vie et peut-être, aussi ?, qu’elle est à la fois contenant et contenu, eau de vie et vase. C’est physique, concret, observable, les cinq sens sont alertés (même l’oreille entend la surprise exprimée). Chez l’homme comment cela se manifeste-t-il ? Chez les peuples dits « primitifs », les garçons pouvaient allez défier le lion dans la savane, ou vaincre toutes sortes de défis. Souvent le garçon devait mettre son courage, son intelligence en éveil pour revenir au sein de la Tribu avec le qualificatif « d’homme », c'est-à-dire apte, maintenant, à fonder un foyer…
Nous sommes au début du 3° millénaire et pourtant, ce terme « initiation » taraude toujours le genre humain. Qu’est-ce que s’est ? Ce terme vient du latin « initiatio, initiare, initium » – commencement, entrée. L’individu est admis à des activités particulières au sein d’une société, d’un groupe, d’une nouvelle « tribu » qu’elle soit philosophique ou religieuse. Elle confère, par l’épreuve – rite d’initiation - le statut d’une personne au sein de ce groupe.
Pourquoi ce voyage initiatique ? Y aurait-il une seconde naissance ? Oui, nous sommes nés un jour dans une clinique ou ailleurs. Nous, comme tous les mammifères, avons aspiré l’air pour la première fois et ouvert les yeux sur un monde que nous ne connaissions pas. C’est la première naissance. Alors quelle est cette volition à naître une seconde fois et pourquoi ? Tout au fond de nous-mêmes, quelque chose nous dit que la mort est une seconde naissance, à quoi ? Mystère. Qui-y-a-t-il derrière ce mystère, cette nouvelle naissance qui nous intrigue ? Qu’avait donc si bien compris Jonathan le Goéland de ce voyage initiatique ?
Que nous apprend Epiméthée, l’étourdi ? Alors que Zeus s’apprêtait à faire apparaître la Lumière , il supplia qu’on le laissa faire. Ainsi il distribua les qualités dont il disposait en dotant en nature chaque animal – pour l’un des griffes, pour l’autre des ailes, pour un troisième des nageoires et ainsi de suite. Tous les animaux eurent des attributs qui leur permettaient d’attaquer, pour manger et se défendre contre l’attaquant. Lorsqu’arriva le tour du « Singe nu », il ne lui restait plus rien. Konrad Lorenz, ce grand naturaliste, nous démontre dans son livre « l’envers du miroir » que ce Singe nu est le seul animal terrestre qui n’a aucune spécialité corporelle. Il est incapable de voler, d’aller dans les abysses et sa vitesse à la course est ridicule face aux grands mammifères. Heureusement pour Epiméthée, son Frère Prométhée fit en sorte que ce Singe nu puisse tenir debout sur ses deux jambes et lui donna un corps droit, proche de celui des dieux. Prométhée se rendit sur son char près du Soleil et vola le feu aux dieux de l’Olympe pour le donner à la nouvelle race, humaine, assurant ainsi leur survie. Pour le punir, Zeus le condamna à être enchainé. (Ne perdons pas de vue qu’un pentagramme inversé s’inscrit dans l’Etoile Flamboyante.) Ce faisant il ouvrait l’abyssale question du « vivre ensemble »…
Il existe donc bien un rapport du fils au père et pourtant ce rapport opère d’une manière bénéfique si… cette seconde naissance se produit. Chacun d’entre nous a le pouvoir de délivrer Prométhée – le Phosphoros ou Lucifer le porteur de Lumière, s’il sait et le veut.
De nombreuses traditions qu’elles soient culturelles, spirituelles évoquent cette nouvelle naissance. Lorsque nous plongeons notre regard dans la civilisation Egyptienne, nous sommes fascinés par Isis, par la Grèce antique avec Déméter, Eleusis… D’autres mystères sont relayés. Nous lisons dans les Evangiles : « A moins de naître de nouveau, nul ne peut voir le Royaume de Dieu » (3.3). La Table d’Emeraude est un des textes les plus célèbres de la littérature hermétique qui évoque une correspondance entre le macrocosme et le microcosme : « Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas ». Elle représente l’enseignement d’Hermès Trismégiste. La Franc-maçonnerie invoque l’acronyme « VITRIOL » qui signifie Visita Interiora Terrae Rectificandoque Invenies Occultum Lapidem que l’on peut traduire par « Visite l’intérieur de la terre et en rectifiant tu trouveras la pierre cachée » qui est l’équivalent du « connais-toi toi-même et tu connaîtras l’univers et les dieux » qui figurait au fronton du Temple d’Apollon à Delphes et qui fut repris par Socrate.
On ne peut, non plus, oublier ici, le mythe Platonicien de l’androgynie (le Banquet 189c-193e). Au commencement les êtres humains étaient de trois sexes doubles : mâle/mâle, femelle/femelle, mâle/femelle. Ayant provoqué la colère des dieux, Zeus les sépara chacun en deux moitiés, formant les êtres humains actuels. Depuis cette séparation cruelle, les êtres humains sont condamnés à retrouver leur moitié.
Plus près de nous, au XVIII, apparait le symbole de la Colonne brisée – « Adhuc Stat » - sur les portes ou à l’intérieur des Eglises.
Sur la porte de l’Eglise d’Utelle dans les Alpes maritimes.
C’est la représentation du pécheur, de l’homme déchu, enfoncé dans sa faute – la Chute du Jardin d’Eden. Cependant aussi bas que soit tombé l’homme, il lui est toujours possible de se redresser et de percevoir la Lumière. Pensez à Prométhée. Voilà ce que nous promet l’Homme libéré par son Initiation. Cette représentation est, pour nous, une image mystérieuse de l’homme. Pour le profane, elle symbolise la mort : la vie brisée. Essayons d’être positif reconsidérons cette image triste à la 1ère lecture. Sa base est solidement établie sur la terre. Sa base est carrée, c’est un parallélépipède rectangulaire, surmonté d’un cylindre. Le carré représente, dans la Tradition , la terre, la concrétisation, la manifestation parfois obtenue d’une manière douloureuse. Ce socle est surmonté d’un cylindre dont la base est le cercle : image du ciel, donc du monde spirituel. Ce cylindre se dresse à la verticale, mais est brisé en son milieu… Cette cassure nous renvoie au Péché originel de la tradition religieuse.
Le serpent, animal chthonien par excellence, donc symboliquement raccordé à la femme, est lié à la Déesse Mère. Le serpent incite la partie féminine, la plus subtile, à manger le fruit de l’Arbre de la Connaissance , il l’initie à la connaissance du Bien et du Mal. Jusqu’alors, Adam et Eve vivaient dans une unicité inconsciente et voilà que, maintenant, ils distinguent la matérialité et l’esprit. Cet Homme – masculin ET féminin – créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, n’avait pas la faculté de penser par lui-même. Il était une image réfléchie, un reflet dans un miroir qu’il ne voyait pas. Ce péché, cet acte le fait entrer dans la liberté, dans l’autonomie de l’être qui pense par lui-même et choisit en toute connaissance de cause… avec tous les risques que cela implique. « Je suis le premier juge de mes pensées, des mes sentiments, de mes actes, et je suis le premier responsable de leurs conséquences ». Maintenant, l’Homme n’est plus limité dans sa pensée ou sa recherche. Il sait qu’il n’est pas fait uniquement de chair. Il peut et il doit, s’il le veut, monter de plus en plus haut vers le ciel sa tête, ce chef qui est le siège de sa raison et de sa spiritualité. Il doit aussi élever son cœur qui n’est autre que le siège de son intelligence émotionnelle. Il doit les amener tous 2 à la rencontre de lui –même, les amener au-delà du matériel, unir le microcosme au macrocosme et unir le fini à l’infini.
C’est ce que représente ce voyage initiatique de la 1ère naissance à la seconde naissance.
Alors ? Lorsque l’on regarde l’anatomie d’un corps humain, quelle information devinons-nous ? Si la photo représente l’anatomie d’une femme nue : nous comprenons que nous naissons d’entre ses jambes, c’est-à-dire en bas. Nous avons été générés de la rencontre des sexes et nous en sommes le résultat. Nous nous matérialisons, comme tout mammifère, par le passage du sexe de la femme, par en bas. Citons à nouveau Platon – dans le livre IV de la République - qu’en bas, où se trouve le bébé avant de naître, il est situé dans le ventre maternel, siège des passions, des appétences de la chair ; de l’égoïsme, de l’orgueil, de l’avidité… et j’en passe.
La vie humaine est celle d’un animal, intelligent certes. D’ailleurs, sur terre, il est le seul animal qui prospère au détriment des autres. Un des rares aussi qui a le pouvoir d’ôter la vie sans nécessité et montrer ainsi son pouvoir. Par ailleurs, les paléontologues, qui sont remontés de l’homo Sapiens-Sapiens à nos origines, ne pensent pas qu’il y ait encore une évolution significative sur le plan corporel pour l’homme. Le seul moyen de progresser l’est par l’esprit.
Si nous naissons une première fois d’en bas, y a-t-il une autre naissance ? C’est dire d’en haut. Pour reprendre l’enseignement d’Hermès Trismégiste ?
Qu’y-a-t-il en haut du corps ? le visage et la bouche. Celle-ci comprend une cavité et une langue qui sont similaires à la rencontre des deux sexes pour créer la vie matérielle, concrétisée dans le corps d’en bas. Ces deux organes, bouche et langue, nécessaires à la Parole , pour certains « le Verbe », sont comme la réunion des deux organes séparés d’en bas et pourtant en une seule individualité en ce qui concerne cette langue déjà dans la bouche. Est-ce que cette deuxième naissance, celle d’en haut, ne serait pas notre interrogation ? Notre interrogation quant à cette initiation qui doit nous libérer… de quoi ? Est-ce que cette bouche n’exprime pas le résultat de cette seconde naissance ? De toute façon nous ne pouvons exprimer QUE ce que nous avons préalablement stocker dans notre mémoire, selon notre choix, conscient ou non.
Le voyage initiatique est la route empruntée entre ces naissances : celle de la « bête » avec notre corps de mammifère et celle de l’esprit. Voyage où l’individu prendrait conscience de l’être sexué, purement corporel – chair et sang - à l’être parlant qui exprime ce qu’il a trouvé dans son fort intérieur, dans ce que les Initiés appellent le « VITRIOL ».
Naître de la parole, avons-nous songé à ce que cela représente ?
Lorsque un problème, une gêne, un souci, une incompréhension nous taraude sans que nous puissions l’exprimer, sans que nous puissions l’expliquer. Nous ne savons pas, à la rigueur nous pensons que…, nous croyons que… mais nous sommes toujours semblables au fœtus dans le ventre de la mère : nous ne sommes pas nés et certainement en état de mal-être où nous nous trouvons sans en connaître la raison. Lorsque bébé nait, a-t-il conscient d’être ? Présentement lorsque nous nous exprimons avons-nous conscience de ce que nous exprimons ? Le bébé grandit et devient vite un adulte conscient des possibilités de son corps… Nous l’avons vu dans le sport. Pour en maitriser toutes les possibilités, le sportif a d’abord conscience d’une performance possible ; ensuite il s’entraine. Il va étudier toutes les faiblesses de ce corps récalcitrant et trouver les bons gestes pour réaliser la performance.
Avons-nous conscience de nos possibilités spirituelles ? Certains disent que seulement 10% de notre cerveau est sollicité… 10% seulement : la partie visible de l’iceberg. Comment percevons-nous cet iceberg ? Comme un trésor à découvrir et utiliser ? Comme un danger pour notre bien-être quotidien balisé par les routines sécurisantes ? Et dans ces 10% combien sont réellement utilisés consciemment ? Que de perspectives enivrantes ou paralysantes nous sont encore offertes… Ne laissons pas notre raison pure et mathématicienne entacher notre volonté d’évoluer, notre créativité, notre désir de grandir en harmonie avec la Vie et sa Lumière. Depuis ce début du millénaire, avons-nous conscience des progrès techniques que nous avons accomplis ? Que connaissons-nous des progrès à faire pour « vivre ensemble »… Il semble que nous soyons toujours à l’âge de pierre… Notre cerveau reptilien a un petit frère très sympathique qui nous permet de dépasser notre dimension animale. Faisons donc confiance à ce petit frère curieux qui nous mènera sur la voie de l’esprit et ses richesses subtiles.
Il est facile de comprendre d’où nous venons : d’un mammifère et la médecine sait nous détailler de la pointe des cheveux à la plante des pieds. Nous savons que nous venons de la rencontre de deux corps, de deux sexes distincts. Nos sens nous le confirment.
Mais savons-nous d’où nous venons en esprit ? Naître en esprit n’est-ce pas faire un voyage sur notre façon de penser et se poser cette question : « y-a-t-il une ou plusieurs façon de penser ? »
Nous voilà à la porte de l’initiation, cette interrogation n’est plus corporelle, elle devient spirituelle, subtile dans son essence même – de l’esprit, rien à voir avec la religion quoique…- D’où venons-nous ? Où allons-nous, comment allons-nous faire ce voyage. A quoi sert-il ce voyage qui va de l’introspection à l’expression de nous-mêmes ?
Lorsque Freud cherchait à comprendre la « mal à dit », il recherchait où se trouvait le « mal » dans le « bien » exprimés par le patient. N’a-t-il pas découvert tout simplement l’éveil de l’être ? Il a vu le moyen et il s’est focalisé sur lui oubliant la fin. Voilà ce qu’il écrivait le 7 mai 1900 à son ami Fliess : « Pour ma juste punition, aucune des régions psychiques inexplorées où, le premier parmi les mortels, j’ai pénétré ne portera mon nom ou se soumettra à mes lois … je n’ai pas eu le dessus (de la ou sur la connaissance) et, depuis je vais cahin-caha. Voilà que j’ai déjà 44 ans et je ne suis qu’un vieil israélite plutôt miséreux ».
Il a agi en scientifique non en Sage. Il lui a manqué deux qualités : le courage d’aller vers… et l’humilité devant l’aventure. Il ignorait, alors, que la seule chose qu’il pouvait trouver face à lui-même ETAIT lui-même… il faut du courage pour aller à sa propre rencontre. Il faut du courage pour s’affronter. Lors de l’initiation, ne dit-on pas que le pire ennemi de l’homme n’est autre que lui-même lorsque l’impétrant est face à lui-même devant le miroir ? Ce miroir qui nous montre la réflexion de notre image. L’impression que l’on retire en regardant soit le reflet du miroir, soit l’image projetée ne saurait être la même puisque les perceptions ne sont pas forcément les mêmes pour l’une et pour l’autre. Quelles sont donc les vraies couleurs ? Celles que je projette ou celles que l’Autre perçoit ? Les deux sans aucun doute possible ! Quand on regarde son reflet, cette photo, qu’y et qui voit-on réellement ? Soi ? Le regard de l’autre ? Celui que l’autre perçoit chez nous ? Son pire ennemi ou son meilleur ami ? Celui qui n’a pas le courage d’aller au devant de lui-même peut-il prendre le visage d’un Dieu ? … ou d’un leader devant les autres ? Ne trompe-t-il pas son monde et lui-même ? C’est un illusionniste, pas un homme. Il se croit et fait croire mais ne connaît pas : savoir sans conscience n’est que ruine de l’âme raconte « Un cantique pour Leibowitz ».
Tout comme Jung et tant d’autres, ces curieux de l’esprit moderne, n’ont-ils pas redécouvert ce que les Sages, les Anciens essayaient de nous dire dans les métamorphoses de l’esprit ?
L’initiation donne l’accès à quelque chose qui n’est pas un savoir acquis par un savoir ajouté aux autres savoirs, l’initiation est quelque chose qui n’est pas révélé par un tiers mais qui est vécu au plus profond de son être où chacun découvre son propre VITRIOL qui lui révèle, à lui : le corps charnel, l’âme ET l’esprit.
« Je suis» est né de la réunion de deux corps et est prisonnier de cette naissance d’en bas. Il le reste jusqu’à la deuxième naissance, celle du haut. Ce «je » est l’expression (par la parole et le son qui sort de la bouche grâce à la langue et le palais buccal), de l’âme (les sentiments) et de l’esprit (l’intelligence). Qu’est en est-il de la qualité ? Le « Je suis » n’a rien à voir avec ce « moi-je » que l’on entend communément en réunion et qui n’est qu’un succédané d’un égo mal connu, parfois confondu avec la personnalité « mana » de Jung. Ce « moi je » est le symptôme d’un manque de confiance en soi que l’individu compense par une prise de position qu’il veut faire admettre à son entourage afin d’exister face aux autres. Ce « moi-je » s’aperçoit, parfois, que le bonheur n’est pas d’être avec les autres, au sein d’un troupeau, en s’enfonçant vers le dégoût de lui-même dans un égo étroit et isolé. Personne n’est là pour le suivre, pour lui donner la bénédiction, en dire du bien. Ce personnage n’est pas une Lumière pour les autres, il n’est pas aimé mais craint. S’il est attentif, ce voyageur aura sa première révélation, négative, certes, mais décisive. L’erreur est formatrice et le pardon rédempteur. D’où vient ce manque de confiance en lui et donc, par extension logique, dans les autres, si ce n’est un manque de connaissance de lui-même ? « Connais-toi toi-même et tu connaîtras l’univers et les dieux » En sachant se lire l’homme saura lire la nature.
Voilà qu’apparaît le temps du voyage intérieur, du voyage subtil et initiatique vers une lumière apaisante.
Que nous enseigne le tableau ci-dessous ? Nous voyons le Christ – nous même – contre l’Axis Mondis (l’Axe du Monde). Il est attaché, la révélation peut le déstabiliser, le désarçonner, il peut retomber, c’est un choc. Sa vision lui montre des personnages qui peuvent représenter les Arts libéraux ou les 4 états de l’homme – l’inconscient siège des désirs, les intelligences, les sentiments, la concrétisation ou la manifestation sur le plan matière… Les positions des membres des personnages ont la forme d’une équerre. A l’arrière plan, un arc de cercle – le compas n’est pas loin. L’un d’eux tient à la main la lettre « Shin » qui symbolise la Force , la Confiance , le Feu. Ce feu qui brûle, qui détruit le négatif, l’ancien, le mal, elle est la Lumière … (cette représentation est visible partout où les Antonins se sont manifestés, ici à Notre Dame des Fontaines dans les Alpes Maritimes)
Le voyageur est un homme qui avance devant lui et sa seule lumière provient du « Je » qu’il découvre en lui et qu’il exprime afin d’éclairer lui-même, d’abord, et les autres, puisqu’il sera suivi en tant qu’exemple. Ce voyage n’est pas simple et, comme je l’ai dit, aller à sa propre rencontre demande du courage ; du courage pour aller au-delà de soi-même en cohérence avec soi-même ainsi que de l’humilité. La tentation est grande d’essayer d’autres voies comme celles déclenchées par la drogue, l’hallucinogène, la folie des grandeurs, qui, une fois dissipés, ne montrent que le vide, la solitude, la tristesse, un immense trou noir - aussi profond que le tonneau des Danaïdes, dans un corps. Ce voyageur prend alors conscience de sa non-existence. Cet individu se trouve dans l’impasse. Il lui faut alors reprendre son bâton et retrouver la bonne voie.
Précédemment, je disais « naître de la parole, avons-nous songé à ce que cela évoquait ? »
Avant que la parole fût, il faut qu’il y ait eu la lumière. Avant, tout est noir et obscur. Puis arrive l’aurore, la lumière. Les formes et les couleurs réfléchissent cette lumière. Ce qui nous entoure prend alors consistance : nous voyons. Cette réflexion des formes et des couleurs nous fait réfléchir : notre regard sur l’objet de notre méditation réfléchit la lumière - la notre - portée sur lui. – ‘Si l’œil n’était « solaire », il ne pourrait pas apercevoir le soleil’ dit Goethe - En avons-nous conscience ? Alors maintenant je peux dire ce que je vois, ce que je pense, je m’exprime, le parle en connaissance de cause. Je viens de naître à nouveau. La substance et les attributs sont « la même chose ». Comme l’argile dans la main du potier devient vase ou plat, le fini découle de l’infini. Je concrétise par du visuel le subtil, l’impalpable de l’esprit, de l’idée. Je partage l’expression concrète de ma réflexion avec l’autre. La lumière cachée dans mon œil devient visible, perceptible par les autres. Lumière tout droit venue de mon esprit. Je projette concrètement ce que j’étais dans le noir et j’offre ce que je suis, avec mes couleurs, aux yeux des autres et à leur soleil.
Je ne peux m’empêcher de citer Spinoza : « Certes, comme la lumière se fait connaître elle-même et fait connaître les ténèbres, la vérité est norme d’elle-même et du faux. » (EthiqueII, Prop.43, Scolie)
Prenons néanmoins conscience, que le XVIII s’appelle aussi le Siècle DES Lumières, et non de la lumière.
D’aucun qui s’exprime par le « moi-je » ne perçoit pas cela. Il va en guerre contre ceux qui ne sont pas conformes à sa vision. Le rouge combat le bleu, le jaune le vert, le carré le triangle, l’équerre le compas. Par contre celui qui s’exprime par le « je suis » ne se pose pas la question, il est et sait, il est au-dessus de ces contingences.
Il faut donc aller au fond de soi et comprendre ce qu’est le V.I.T.R.I.O.L. Il faut avoir ce courage d’aller vers soi, en soi. Nous sommes, tous, des porteurs de Lumière. Le sachant, nous pouvons donc aller vers l’Autre. C’est évident, oui, mais après ? Le voyageur de l’intérieur est celui qui s’aperçoit que ce qui lui manque le plus est lui-même, pas ce « moi-je » qui prend au départ beaucoup de place, mais LUI à la première personne et que personne d’autre ne peut penser, dire ou faire à sa place. En allant vers cet esprit, le sien, il rencontre l’obstacle, l’ombre qui lui barrait le chemin de l’expression personnelle. Balayer et vaincre cet obstacle est le plus grand combat qu’un humain puisse livrer : tuer son propre ennemi, c'est-à-dire la peur de son ombre, ce qu’il avait admis hier pour vrai et qu’il remet en question à la connaissance de son expérience, de sa raison et de ses sentiments. Ce faisant, il se réapproprie son « Je suis » dont d’autres l’avaient dépossédé hier en lui imposant des vérités qui n’étaient pas les siennes. Ce voyageur défait alors tout ce qui hier lui commandait d’obéir, il doit trancher les fils de marionnettes qui le reliaient à ses forces d’habitudes sans qu’il en soit conscient : il faut qu’il meurt à ses anciennes pensées pour renaître à lui-même, libre ! Libre comme Jonathan le Goéland.
Ce faisant, il renoue avec la capture de l’hippopotame au temps de la XVIII ° dynastie Egyptienne (milieu du XIV avant JC). C’est l’incessante lutte entre Horus et Seth (l’hippopotame). Horus se transformera en St Georges avec l’avènement du Vatican . L’esprit doit vaincre la bête en nous. Cette bête qui ne vit qu’en troupeau, vassale du dominant du moment.
C’est le voyage que l’homme se doit de faire pour se débarrasser de tout ce qui lui est contraire, qui n’est pas lui. Pour être en cohérence avec sa vraie personnalité et sa vraie nature. Tel, lors de ce nouveau baptême, le voyageur efface tout ce qui n’est pas lui. Un sentiment de délivrance et de plénitude l’envahit : il est en paix avec lui-même et avec les autres voyageurs. Il a découvert qui il est, où il va et pourquoi. Il n’est plus seul, le « Je suis » l’accompagne partout où il se trouve. Naître d’en haut c’est pouvoir dire « je serai avec toi » et se dire « tu étais là et je ne le savais pas, « je suis celui qui est » avec toi. Le voyageur connaît le VITRIOL, il l’a aussi compris et il le vit en confiance et en conscience avec l’Autre. Il s’est révélé à lui-même. Enfin.
« Ce que nous serons n’a pas encore été manifesté » 1er Epitre de Jean 3.2
La première naissance est la réunion de deux sexes complémentaires orchestrée par un désir plus ou moins conscient. La seconde naissance est toujours voulue, volontaire et consciente (même si, parfois, son origine provient d’un mal être).
Voilà pourquoi entre l’Odyssée d’Homère et l’Homme réalisé, il faut faire ce (= SE pour voyage vers SOI-même) voyage. Il est une étincelle magique qui, jointe à d’autres, illumine le chemin de tous.